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« Le labyrinthe » - chapitre 1 : « Déambulations gödéliennes » — L'Encrier
Vous êtes ici => Accueil > Liste des histoires > « Le labyrinthe », par SimonF - - - > Chapitre 1 : « Déambulations gödéliennes » -
L'histoire Ce chapitre
Publié : le 10/04/2015 à 14h25 - Mise à jour : le 10/04/2015 à 14h25 - Commentaire(s) : 0 - Lecture(s) : 394 - Chapitre(s) : 1 - Mots : 5597 - Complet : non - AMR : Tous publics - Favorite de : 0 - Abonnés à l'histoire : 0 Publié : le 10/04/2015 à 14h25 - Modifié : jamais - Commentaire(s) : 0 - Lecture(s) : 394 - Mots : 5597

Le labyrinthe

Résumé : Un vieux sage, au temps de ses derniers jours recherche un disciple à initier pour perpétuer son œuvre.

Déambulations gödéliennes

      « Merlin » était un vieux sage, aimé et respecté. Sachant la mort proche, il songea qu’il était temps pour lui de transmettre son savoir, afin qu’il lui survive.

     Après l’avoir informé très précisément de ce qu’il recherchait, il confia la tâche à Fidelius, son loyal serviteur, de sélectionner quatre prétendants parmi lesquels il choisirait son disciple

     Fidelius revint un an plus tard, accompagné de quatre jeunes garçons, tous avides de connaissances et qui souhaitaient vivement apprendre de lui tous les trésors de l’expérience qu’il avait accumulés au cours de sa longue vie.

     Le premier était d’une nature simple et franche, il rayonnait. Il s’appelait « Ariel ». Il était d’un caractère léger et joyeux, aimait la vie et les gens. Il était attentif à tout ce qu’il pouvait entendre autour de lui et adorait écouter ceux qui avaient des choses originales et nouvelles à dire. Il était aimé de tous pour ce caractère affable, cette joie permanente, et pour l’attention et l’amour qu’il portait à son entourage.

     Le deuxième, un paysan, s’appelait « Pierre ». C’était un solide gaillard qui avait les pieds bien sur terre. Il aimait la nature et tout ce qu’il pouvait voir, toucher, sentir, goûter ou entendre. Il était toujours à l’affût de nouvelles sensations qui pourraient enrichir ses connaissances des choses du monde.

     Le troisième, un aventurier, s’appelait « Marin ». Il passait son temps en de longues réflexions. Il aimait tout ce qui se construit par l’esprit, et n’était jamais plus heureux et plus épanoui que lorsqu’un nouveau problème venait chatouiller son sens de la déduction. Il avait une grande mémoire et avait déjà engrangé une somme impressionnante de savoirs.

     Le quatrième s’appelait « Ignacio », de tous c’était le plus tourmenté. Il passait son temps à douter de ce qu’il voyait, de ce qu’on lui disait. Il était tiraillé par des sentiments contradictoires. D’un côté, il était en quête de vérité, avide de comprendre. De l’autre, il n’était jamais satisfait des réponses qui lui étaient fournies. Chaque fois, il trouvait un petit détail, qui pouvait apparaître comme insignifiant, mais qui, pour lui, venait détruire tout le bel édifice qu’il venait d’échafauder. Rien n’était jamais simple, ni acquis. Il se réfugiait souvent dans le rêve, celui d’un monde idéal où tout serait à portée de main et où la clarté apporterait chaque jour plus de compréhension. Mais, même dans ces évasions, il sentait que cette facilité n’était qu’un bonheur superficiel. Il s’était fait à l’instabilité permanente que lui procurait l’incertitude, c’était son univers.

     Merlin réunit les quatre jeunes gens dans sa grande maison et leur expliqua qu’il choisirait parmi eux celui qui serait son disciple.

     Pour cela, il leur proposa une épreuve. Il expliqua qu’il avait fait construire un labyrinthe qu’ils devraient traverser. Cependant, ce labyrinthe n’était pas un simple entrelacs de couloirs, de passages et de portes, il comportait plusieurs issues. Chacune des issues correspondait à une manière différente de résoudre l’énigme du labyrinthe. Et, pour chacun de ceux qui tentaient l’expérience, il y avait un parcours et une sortie unique correspondant à sa personnalité.

     Cela ne voulait pas dire que le nombre de parcours et de sorties était aussi grand que le nombre de personnes qu’il y avait dans notre monde. Déjà, en choisissant les candidats, Merlin avait demandé à Fidelius de sélectionner, parmi tous les volontaires qui se présenteraient, quatre qui correspondaient à « l’esprit du labyrinthe ».

- Mais comment serons-nous sûrs de trouver la sortie qui nous correspond ? s’exclama Marin.

- Vous n’avez aucun souci à vous faire pour cela car, si tant est que vous découvriez une sortie, vous ne pourrez trouver que la vôtre.

- Sommes-nous si peu nombreux ou celui-ci est-il suffisamment grand pour qu’il y ait une sortie pour chacun de ceux qui pourraient y pénétrer ? Questionna à son tour Pierre.

- Pour cela non plus, vous ne devez pas être inquiets, car ce ne sera jamais la taille du labyrinthe qui fera que vous échouerez dans votre quête. La réussite de l’entreprise ne dépendra que de vous. Certes, lorsqu’on recherche des candidats pour cette épreuve, bien peu s’avèrent à la hauteur. Il y a plusieurs manière d’échouer dans cette quête mais il y a une seule manière de réussir : il faut suivre le bon parcours et trouver la bonne issue. En général, si vous vous trompez trop et souvent, le Labyrinthe finit par vous rejeter et c’est une garantie pour ne pas en rester indéfiniment prisonnier. Il est vrai, malgré tout, que, si j’avais autorisé tous ceux qui possèdent l’esprit du labyrinthe de tenter l’expérience, c’eut été une foule immense qu’il aurait fallu convier, et cela aurait pris beaucoup trop de temps et certainement plus que ce qu’il me reste à vivre. Mais, encore une fois, ce n’est pas pour cela que j’ai limité le nombre de candidats, la raison en est que ce labyrinthe a un secret que je vais vous révéler : l’issue recherchée n’existe que si le candidat la trouve. Grâce à ce subterfuge, j’ai pu limiter le nombre maximum de sorties. Ainsi, quand vous vous engagerez dans le labyrinthe, si par extraordinaire vous trouviez tous simultanément l’issue qui vous correspond, vous pourrez sortir victorieux en même temps, sans que les chances de réussite de chacun d’entre vous en soient diminuées.

- Ma sortie est-elle déjà en place ? s’inquiéta Ignacio.

- La tienne comme celle de tes amis. Tu la verras et tu l’ouvriras comme si elle avait été toujours là, comme si elle n’attendait que toi depuis le début. Dès que tu pénètreras dans le labyrinthe, il se configurera en fonction de ce que tu chercheras : un entrelacs à l’image de tes pensées, en quelque sorte. Á partir de cet instant, ce sera ton labyrinthe.

- Comment pourrait-il être à la fois, mon labyrinthe, celui de Pierre, de Marin ou d’Ignacio si nous y pénétrons tous ensemble ? s’amusa Ariel.

- C’est bien là le secret du labyrinthe, et c’est pourquoi vous ne pourrez trouver que votre propre porte, car vos chemins ne pourront jamais se croiser. Il aurait fallu pour cela que vous soyez jumeaux, que vous ayez un esprit, un caractère, une raison semblable, pour que le labyrinthe vous confonde et vous présente le même chemin. Vos personnalités, que j’ai demandé à Fidelius de choisir, sont très différentes, et aucune interférence ne pourra se produire entre vos différents parcours.

     Sur ce, Merlin distribua une carte du labyrinthe à chacun des jeunes garçons, et les conduisit sur le site. C’était une grande plaine uniformément herbeuse, fermée par un mur rectiligne dont aucune extrémité n’était visible. Il semblait s’étendre à l’infini et seules cinq portes en trouaient la façade. Il désigna à chacun la porte par laquelle il devrait pénétrer.

     Quand ils examinèrent leurs cartes et qu’ils les comparèrent, ils constatèrent qu’elles leur semblaient toutes identiques. Seules les portes d’entrée différaient et correspondaient bien à celles que leur avait assignées Merlin. L’issue qui figurait à l’autre extrémité semblait, elle, unique.

- Mais nous avons tous la même carte ! Comment pourrons-nous trouver chacun une porte de sortie différente puisqu’il n’y a qu’une seule issue et qu’elle est identique sur chacune de nos cartes et devant nous ? s’exclama Ignacio.

- Vous pensez avoir tous la même carte et vous aurez beau vous concerter et vous poser toutes les questions que vous voudrez, vous ne saurez pas distinguer la moindre différence entre elles. Regardez vos portes respectives et dites-moi quelle en est la couleur ?

     Tous étaient d’accord pour dire que la porte d’Ariel était blanche, celle de Pierre verte, celle de Marin bleue et celle d’Ignacio rouge.

- Nous nous entendons tous sans hésiter sur la couleur de chacune des portes, où est le problème ? interrogea Pierre.

- Non, vous n’êtes pas d’accord sur la couleur des portes. Vous êtes seulement d’accord sur le nom de ces couleurs. Cela change tout. Comment pouvez-vous affirmer que, quand l’un de vous identifie le rouge d’une certaine manière, son voisin le perçoit exactement de la même manière ?

     Si Pierre pouvait s’insinuer dans l’esprit d’Ignacio, peut-être ne reconnaîtrait-il plus les portes car, là où il voyait une porte verte, peut-être verrait-il une porte rouge et vice versa. Eh bien, il en est de même pour vos cartes, car ce ne sont pas de simples cartes. Hormis le fait qu’elles ne vous révèlent pas clairement le chemin à suivre et qu’il vous faudra les comprendre pour qu’elles vous conduisent au but, elles sont complètement différentes. Ces différences, vous ne les percevez pas. Vous examinez votre carte et celles de vos voisins avec vos yeux, une image que votre esprit interprète selon ses propres références. Si Marin semblait comprendre ce que Merlin venait d’expliquer, ce n’était le cas ni de Pierre ni d’Ignacio qui fronçaient le front sous les efforts qu’ils fournissaient pour saisir le sens de ces paroles.

     Quant à Ariel, il ne semblait pas troublé le moins du monde par le problème : il avait une vision qui lui était propre, et bien, soit ! Il manifesta son impatience de commencer l’épreuve :

- En réalité, le problème est à l’intérieur du labyrinthe, mais vous commencez à vous poser des questions avant même d’y être entré. Gardez un peu de forces pour ce qui vous attend !

     Merlin ne releva pas la remarque d’Ariel, tout juste jeta-t-il un coup d’œil furtif dans sa direction avec un air de doute.

- Peut-être Ariel a-t-il raison. Même si je pense finalement avoir compris ce que vous nous avez expliqué, ces détails concernant les différences entre nos cartes font-ils partie de l’énigme ? s’enquit Pierre.

- Peut-être ou peut-être pas, cela dépendra probablement de vous ? répondit Merlin. Pour la première fois, Merlin était resté vague, pour ne pas dire énigmatique. Il n’avait pas cherché à répondre de manière claire.

- Et bien, mes chers petits, vous avez eu assez de temps pour comprendre ce que j’attendais de vous. Il va falloir maintenant entrer dans le labyrinthe, dit Merlin, d’un ton enjoué, comme pour les rassurer et leur faire oublier la question qu’il venait d’éluder.<p> <> Ariel, comme cela était prévisible, se précipita vers sa porte blanche, l’ouvrit violemment et se jeta à l’intérieur.

     Dès que la porte claqua derrière lui, il jeta un coup d’œil sur sa carte et s’aperçut avec étonnement que, contrairement à ce qu’avait dit Merlin, un tracé était inscrit de manière très claire et sans la moindre ambiguïté. Il semblait n’y avoir qu’un seul bon chemin qui, de plus, paraissait très court. Il le suivit sans encombre et se retrouva très rapidement devant une porte sur laquelle était gravée l’inscription « SORTIE ». Triomphalement, il la poussa et elle s’enfonça sans la moindre résistance. Il bondit hors du Labyrinthe.

     Une surprise l’attendait. Devant lui, se tenait Merlin, goguenard. Il comprit que quelque chose n’allait pas. Il se retourna pour constater que la porte qu’il venait de franchir était celle par laquelle il était entré.

- Ai-je gagné ? demanda-t-il, un peu inquiet pour la première fois.

- Penses-tu avoir gagné ? lui rétorqua Merlin, moqueur.

     Ariel regarda sa carte : elle avait repris l’aspect imprécis qu’elle avait avant qu’il ne pénètre dans le labyrinthe.

- Si j’ai gagné, c’est que l’entrée est aussi la sortie, dit-il d’un ton un peu déçu.

- Penses-tu qu’il en soit ainsi ? lui répondit Merlin.

- Sur la carte, la porte d’entrée est différente de celle de sortie, reconnut-il.

- Quel genre de porte as-tu ouvert dans le labyrinthe ? Questionna Merlin.

- Oh ! C’est très simple. Il n’y a qu’une seule sorte de portes : elles sont toutes blanches, semblables à celle-ci, dit-il en désignant la porte qu’il venait de repasser. Elles sont toutes bonnes et conduisent toutes vers la sortie. J’ai bien essayé une fois de choisir une porte qui ne suivait pas le parcours indiqué par la carte, mais celle-ci s’est transformée aussitôt pour me faire reprendre le bon chemin. C’était trop simple, dit Ariel en rigolant.

- Qu’as-tu appris lors de ton parcours dans le labyrinthe, et quel secret y as-tu découvert ? Questionna Merlin.

- Vraiment, je n’y ai rien appris. Le chemin était inscrit si clairement sur ma carte que je n’ai eu aucune difficulté à trouver la sortie.

- J’en déduis donc que tu as tourné en rond et que tu es revenu à ton point de départ. Comme tu le dis, tu n’as tiré aucun enseignement de ton passage dans le labyrinthe. Est-ce bien cela ?

- C’est exactement cela, admit Ariel, sans hésiter.

- En venant ici, que cherchais-tu et que comptais-tu trouver ?

- Rien de spécial. J’étais ouvert à toutes les découvertes, et j’espérais que vous me choisiriez. Fidelius m’a demandé de le suivre, alors je l’ai suivi car je suis curieux des choses nouvelles.

- Eh bien, tu pourras dire que le labyrinthe t’a donné ce que tu en attendais, c’est-à-dire rien. Désolé, mon cher Ariel, mais tu vas boucler la boucle dans laquelle tu t’es engagé, en retournant chez toi pour reprendre ta vie là où tu l’avais laissée lorsque Fidelius est venu te chercher.

     Ce ne serait pas Ariel qui aurait l’honneur d’être le disciple de Merlin.

     Ariel rentra chez lui et retrouva sa vie, aussi heureuse qu’auparavant. Il oublia rapidement l’épisode qu’il venait de vivre, sa déception avait été éphémère et son naturel enjoué reprit rapidement le dessus.

     Lorsque Pierre referma la porte verte derrière lui, sa carte s’éclaira d’une vive lumière. Plusieurs chemins y étaient tracés de manière précise et lui donnaient autant de possibilités pour entamer son parcours. Si l’issue y figurait tout aussi clairement, aucun des chemins proposés n’y était relié. En réalité, il y avait des blancs sur la carte, des zones vides, sans aucune indication, comme autant d’incertitudes qu’il lui fallait lever.

     Il s’en trouva rassuré. Certes, la carte ne lui révélait pas d’emblée tous ses secrets. Cela, il s’y attendait, mais il conclut que, par une exploration systématique, il viendrait forcément à bout de l’énigme du labyrinthe.

     Il se mit donc en chemin, notant systématiquement sur sa carte les trajets qu’il suivait, pour en garder la mémoire. Cependant, les indications sur la carte évoluaient sans arrêt. Des voies qui n’y étaient pas apparaissaient, comblant certains vides. D’autres au contraire s’effaçaient au fur et à mesure que Pierre s’en éloignait. Bientôt, il comprit que la carte était une sorte de loupe qui se déplaçait avec lui, révélant au fur et à mesure les informations nécessaires au moment où il en avait besoin. Tout ce qui était inutile ne figurait pas, lui permettant d’avoir une vision simplifiée du chemin à suivre. Une porte faisait exception : la porte de sortie qui, elle, était en permanence apparente.

     Comme il notait le chemin qu’il suivait, cela lui évitait de tourner en rond, et sa carte se remplissait donnant une vue de plus en plus complète de la structure du labyrinthe.

     Il y avait de bonnes directions qui semblaient le rapprocher de l’issue, et d’autres, fausses, qui le conduisaient dans une impasse, l’obligeant à rebrousser chemin. Sa méthode systématique le faisait progresser lentement mais sûrement. Il maîtrisait parfaitement la situation et en ressentait de la satisfaction.

     Enfin, il poussa la dernière porte sur laquelle figurait l’inscription « SORTIE » et comprit qu’il venait de terminer l’épreuve car Merlin était là pour l’accueillir.

- Ai-je réussi ? demanda-t-il, inquiet en se retournant pour constater qu’il était bien sorti par la cinquième porte, celle supposée être l’issue du labyrinthe.

- Á sortir du labyrinthe, certainement, mais qu’en penses-tu toi-même ? répondit Merlin.

- J’ai exploré pratiquement tout le labyrinthe et j’en ai reconstitué la structure, dit-il fièrement en exhibant la carte sur laquelle figuraient les chemins qu’il avait dessinés et qui représentaient apparemment une bonne partie du labyrinthe.

- Il y a malgré tout encore quelques trous, fit remarquer Merlin.

- Oui, mais vraiment peu… Je n’avais pas compris que le but était de reconstituer la carte dans son entier. Je n’ai noté que les chemins que j’ai parcourus, pour ne pas me perdre ou repasser deux fois au même endroit.

- Tu as très bien compris les règles du jeu, mais es-tu sûr que, dans ces trous que tu n’as pas explorés, il n’y a pas des solutions qui t’auraient échappé ? Des solutions plus rapides, plus surprenantes ou plus riches en enseignements ?

- Je ne peux rien dire de ce que je n’ai pas exploré, admit Pierre.

- Peux-tu me décrire les portes que tu as ouvertes ? questionna Merlin.

- Oh ! C’était très simple. Elles étaient toutes vertes, semblables à la porte d’entrée du labyrinthe. La seule chose qui les distinguait était que certaines menaient à des impasses et d’autres me permettaient de progresser. Ce Labyrinthe comporte deux sortes de portes, les bonnes et les mauvaises.

- Ton analyse est précise mais je suis au regret de te dire que le labyrinthe est beaucoup plus riche et plus complexe que ce tu crois. Mon cher Pierre, aussi méritant que tu sois pour avoir trouvé la porte de sortie, tu n’as pas découvert tous les mystères du labyrinthe, conclut Merlin en donnant à Pierre un petit paquet en guise de cadeau de consolation.

     Malgré sa grande perspicacité, Pierre ne pourrait pas être le disciple de Merlin.

     Pierre ouvrit le paquet et découvrit une carte complète du Labyrinthe. Une carte qui lui parut étrange car elle ne ressemblait pas à celle qu’il avait reconstituée. Elle semblait beaucoup plus complexe. Il entreprit de retrouver sur la carte le parcours qu’il avait suivi, mais, après plusieurs tentatives infructueuses, il se tourna vers Merlin, un peu déconcerté.

- Comment se fait-il que, alors que j’ai réussi à traverser le labyrinthe, je n’y parvient pas sur la carte ? Est-ce bien la carte de ce labyrinthe ?

- Absolument, le jeu pour toi consistera à retrouver le parcours que tu as expérimenté, et je te garantis qu’il y figure. C’est un cadeau en forme d’énigme. En plus de te divertir il devrait t’apprendre beaucoup …

     Merlin salua Pierre, qui, maintenant fasciné par la carte qui lui avait été remise, s’en retourna chez lui, perdu dans ses réflexions.<p> <> Marin se dirigea vers la porte bleue en examinant sa carte attentivement. Lorsqu’il parvint au niveau de la porte, il se heurta la tête contre le panneau tant il était absorbé par son observation.<p> <> Il ouvrit la porte en se frottant le front et pénétra dans le labyrinthe.

     Il constata rapidement, comme ses compagnons, que la carte n’avait plus le même aspect à l’intérieur du labyrinthe qu’à l’extérieur. Globalement, le plan de tout le labyrinthe semblait y figurer, mais de manière floue et imprécise. Tous les chemins y étaient tracés mais cela constituait un tel plat de spaghettis qu’il était difficile d’identifier un chemin de bout en bout sans se tromper.

     Il éloigna la carte de ses yeux pour l’examiner à bout de bras. De ce point de vue, la carte apparaissait comme une surface d’un gris plus ou moins uniforme, avec quelques nuances près.

     En plissant légèrement les yeux pour accommoder sa vue, il s’aperçut que certains parcours ressortaient mieux que d’autres. Il se livra à l’exercice de faire courir son regard, alternativement de l’entrée à la sortie, en se concentrant de plus en plus intensément et en vidant sa tête de toute pensée parasite. Après quelques secondes de cet exercice difficile, il crut pouvoir distinguer un chemin qui semblait traverser le Labyrinthe de part en part, de la porte d’entrée jusqu’à la porte de sortie. Il tenta de mémoriser cette vision et de suivre le chemin correspondant. Passé les premières portes, sa mémoire lui faisant défaut, il s’arrêta pour réexaminer la carte. Celle-ci avait changé d’aspect par de subtils détails. Il recommença l’exercice de « la vision globale avec la tête vide », comme il baptisa la méthode. Il s’aperçut que le chemin qu’il arrivait à faire ressortir de cette manière ne partait plus de la porte d’entrée mais d’un autre point à l’intérieur du labyrinthe. Il en déduisit que la carte lui montrait le chemin à partir de sa position actuelle. Ainsi, progressant petit à petit, il avançait vers la sortie de manière significative.

     Tout aurait pu continuer ainsi, s’il n’était pas tombé sur une difficulté nouvelle. En ouvrant une porte, il se trouva face à un couloir unique au bout duquel il découvrit rapidement un cul-de-sac. Il dut faire demi-tour, mais une désagréable surprise l’attendait. En repassant la porte qu’il venait de franchir, il découvrit également un couloir unique qui se terminait lui aussi en cul-de-sac. La situation devenait embarrassante. D’après ce qu’il venait de voir, il se trouvait face à une impasse et dos à une porte donnant également sur une impasse. Il conclut qu’il était dans une section du labyrinthe sans issue, une section qu’il n’aurait jamais dû atteindre et dont il ne pourrait pas sortir. Un peu paniqué, il ouvrit à nouveau la porte et eut une deuxième surprise : il était devant un couloir classique avec plusieurs issues. Cela le soulagea. Par curiosité, il referma la porte puis la rouvrit : il découvrit à nouveau un cul-de-sac. Il répéta l’opération et constata que, derrière la porte, l’aspect du Labyrinthe changeait à chaque fois.

     L’étonnante propriété de cette porte le surprit mais ne le troubla pas, car il se souvenait des paroles de Merlin lorsqu’il leur avait expliqué l’épreuve. Il se remit en chemin et découvrit à plusieurs reprises d’autres portes qui avaient également cet étrange comportement.

     Finalement, il eut l’immense bonheur d’ouvrir la porte sur laquelle était inscrite la mention « SORTIE » et, comme les autres, il vit Merlin qui l’attendait avec un sourire.

- Eh bien, j’ai cru que je n’y arriverais pas ! S’exclama-t-il.

- Parce que tu penses y être arrivé ? répondit Merlin en plaisantant.

- En tout cas, j’ai trouvé la porte de sortie et j’ai compris que c’était bien ce qu’il fallait faire.

- Bien sûr, une fois dans le labyrinthe, il faut en ressortir, et si possible par la porte de sortie ! S’amusa Merlin, qui reposa la question, concernant les portes rencontrées, qu’il avait déjà posée aux deux premiers concurrents.

- Même si toutes les portes sont bleues, on peut dire qu’il y a au moins trois types de portes, expliqua Marin. Il y a des portes qui ouvrent sur d’autres couloirs, des portes qui ne mènent nulle part, car elles donnent accès à des culs-de-sac. Enfin, il y a un troisième type de portes, un peu plus bizarres celles-là : elles peuvent aussi bien mener à des couloirs qu’à des culs-de-sac. Il y a des bonnes portes, il y a des mauvaises portes et il y a des portes à la fois bonnes et mauvaises. C’est un peu compliqué mais je m’en suis sorti malgré tout, finit Marin, avec une pointe de fierté.

- Mon cher Marin, tu t’es approché de la vérité du labyrinthe, tu dis qu’il est compliqué mais il est encore plus compliqué que tu le crois. Sa complexité est plus grande que celle que tu as vaincue. Tu n’as pas percé le mystère du labyrinthe dans toute sa variété.

     Merlin tendit un paquet à Marin, pour le récompenser de ses efforts et du succès incontestable qu’il avait obtenu. Mais lui non plus ne serait pas son disciple.

     Marin ouvrit son paquet et découvrit une paire de lunettes, qu’il chaussa.

     Le paysage au travers de ces lunettes lui apparut comme merveilleusement beau. Les arbres et l’herbe étaient d’un vert tendre comme il n’en avait jamais vu. Le ciel était d’un bleu profond et infini. Le soleil était d’un jaune éclatant et la tunique de Merlin d’un rouge pur et chatoyant. Tout s’animait autour de lui, comme un décor magique aux couleurs multiples. Il était émerveillé.

     - C’est magnifique, dommage que la réalité ne soit pas aussi belle, murmura-t-il doucement en remerciant Merlin.<p> <> - Tout le jeu consistera pour toi à voir ces belles choses sans les lunettes, car ce que tu découvres au travers est le vrai monde, peut-être éduqueront-elles ta vue ? lui dit Merlin en le remerciant pour avoir accepté de participer à l’épreuve.

     Marin se retira, plongé dans un grand bonheur et dans une grande perplexité.

     Quand Ignacio s’engagea dans le labyrinthe, il jeta un dernier coup d’œil inquiet en direction de Merlin, avant de refermer la porte rouge derrière lui. Merlin lui adressa un petit hochement de tête pour l’encourager.

     Avec empressement, il reporta son regard sur sa carte, mais sa surprise fut grande quand il constata que pratiquement toutes les indications avaient disparu. Seules subsistaient la porte d’entrée, la porte de sortie, et une vague trace qui menait de l’une à l’autre. Un petit point brillant semblait figurer sa position sur cette trace car il se déplaçait en même temps que lui. Lorsqu’il avançait et franchissait des portes, c’était toujours le même chemin qui apparaissait sur la carte mais il se tordait, se recourbait et se déformait en fonction de son déplacement.

     Cela avait l’avantage de le rassurer car il pouvait mesurer en permanence sa progression et vérifier qu’il restait sur un itinéraire possible qui, de l’entrée, le conduisait à la sortie mais cela avait aussi le gros inconvénient de ne lui fournir aucune indication précise sur la direction qui lui fallait prendre. Lorsqu’il se trouvait devant un dilemme, il regardait sa carte, il tentait de l’orienter en fonction de ce qu’il voyait mais ce n’était pas simple car le tracé tournait en même temps que la carte. Quand enfin il arrivait à stabiliser à peu près le dessin, il décidait du chemin à suivre. Cette méthode, certes approximative, semblait néanmoins donner des résultats car le point paraissait progresser le long de la trace.

     Comme Marin, Ignacio fut confronté à des portes qui étaient alternativement bonnes ou mauvaises, dont il se joua à peu près aussi bien que Marin l’avait fait. Mais il n’avait pas tout vu ! En poussant une porte, en apparence aussi banale que les autres, il fut ébloui par une blanche lueur sans nuance qui lui fit découvrir un paysage vide, uniforme et sans contraste. Sans lâcher la porte, il fit prudemment un pas en avant et eut la surprise de flotter dans cet espace sans repère où même le sol semblait ne pas exister. En se retournant vers la porte, il constata avec stupeur qu’elle avait également perdue de sa précision. Même sa main, qui tenait encore la poignée, lui semblait un peu floue. Sa carte avait réagi et ne marquait plus que le petit point à peine visible qui indiquait sa position. Effrayé, il fit demi-tour et quitta cet univers inquiétant où il craignait de se perdre.

     Une autre fois, ce fut moins angoissant mais tout aussi surprenant : après avoir passé une porte, il se retrouva exactement au même point que de l’autre côté. Il avait beau franchir la porte en tous sens, il entrait toujours dans le même couloir qu’il venait de quitter. Heureusement il réussit à sortir de ce mauvais pas, lorsqu’après plusieurs tentatives, il se retrouva enfin dans un autre couloir. Une autre fois encore, après avoir franchi une porte, il remarqua que sa carte avait subi des modifications inhabituelles. La porte d’entrée n’y figurait plus et le fin tracé qui représentait son chemin n’était plus relié qu’à la porte de sortie. L’autre extrémité, qui auparavant était reliée à la porte d’entrée, flottait en l’air, libre et instable. Il fit marche arrière et rouvrit la porte qu’il venait de franchir. Il se retrouva face à l’univers blanc et vide dans lequel il avait pénétré une première fois. Il comprit qu’il avait franchi un point de non-retour puisqu’il n’était plus question de revenir en arrière, ou du moins de revenir par le chemin qu’il avait emprunté jusqu’à présent.

     Une sueur froide l’envahit. Que son chemin se détache de l’entrée était très inquiétant, mais qu’il vienne à se détacher aussi de la sortie pouvait être dramatique car alors ce serait le signe qu’il s’était perdu. Il lui fallait maintenant être très prudent et ne franchir aucune porte avant d’en vérifier l’effet sur la carte.

     Toutes les propriétés nouvelles des portes qu’il découvrait semblaient se combiner à l’infini pour le surprendre toujours davantage. Ainsi, une fois, à peine eut-il fermé une porte derrière lui qu’il fut plongé dans le même univers vide qu’il avait déjà expérimenté et qu’il redoutait tant. Tout s’était effacé instantanément dès que sa main avait lâché la poignée. Fort heureusement, il était debout face à une porte, qui était apparue au moment où les autres repères avaient disparu. Il n’avait pas le choix et s’empressa de l’ouvrir pour retrouver le labyrinthe.

     Quelque part dans le labyrinthe, il devait y avoir un ou plusieurs espaces vides dans lesquels on pouvait entrer ou sortir mais qu’il devait être très difficile de traverser car, une fois dedans, on n’avait plus aucun repère. Dans ce cas, même la carte ne vous était d’aucun secours. Le comble fut atteint quand il eut l’impression de sortir du labyrinthe. Il se retrouva en effet devant le mur infini, tel qu’il lui était apparu, lorsqu’il était avec Merlin et ses compagnons, mais personne ne l’attendait et il n’y avait qu’une seule porte à sa disposition, celle qu’il venait de passer. Sa déception fut immédiate, il comprit que cette porte n’était pas la véritable sortie mais une porte menant sur un autre extérieur. Cette même blancheur uniforme semblait baigner le mur extérieur du labyrinthe qui se perdait dans le flou d’un lointain horizon. Il ne savait plus si l’espace vide, si tant est qu’il fût unique, était contenu dans le labyrinthe ou contenait le labyrinthe. Prudemment, il battit en retraite en repassant cette fausse issue.

     Bientôt il découvrit encore un autre comportement du labyrinthe. Il passa une porte et remarqua sur la carte que l’extrémité du tracé qui représentait sa position et qui le reliait à la sortie, avait sauté à l’autre bout du labyrinthe, dans un autre couloir ne débouchant pas sur celui qu’il venait de quitter. Intrigué, il repassa par la porte et le phénomène se reproduisit, il se retrouva encore en un autre lieu du labyrinthe, distant et complètement différent. Ces portes semblaient le faire sauter d’un point à un autre du labyrinthe, sans aucune logique. Décidément, le labyrinthe n’était pas à cours d’imagination pour vous tromper et vous perdre.

     Heureusement, alors qu’il commençait à désespérer, la porte sur laquelle était inscrit « SORTIE » se présenta enfin devant lui. C’est soulagé et fatigué qu’il la franchit.

     Merlin l’attendait, mais il lui tournait le dos.

- Tu en as mis du temps, mon pauvre Ignacio ! Je commençais à m’inquiéter sérieusement. Ignacio s’arrêta.

- Moi-même, je dois reconnaître que je n’étais pas très rassuré, avoua-t-il. Malgré tout, je m’en suis sorti et tout est bien, ajouta-t-il, un peu tendu malgré tout devant Merlin qui s’obstinait à lui tourner le dos. Finalement, ce labyrinthe peut être dangereux, et je crains que l’on puisse s’y perdre, dit-il avec un ton de léger reproche. Alors il tenta de contourner Merlin pour lui faire face, mais il eut beau tourner autour, il se trouvait toujours dans son dos.

- Tu as tout à fait raison, et je suis assez heureux que tu en sois revenu, car à t’entendre, il semble que le labyrinthe ait tenté de te surprendre et qu’il ait usé de tous ses pièges pour te perdre. Mais n’essaye pas de me faire face, tu ne découvrirais aucun autre visage que le tien et je n’en ai pas encore fini. Puis, Merlin posa la question concernant la nature des portes et Ignacio toujours plus surpris lui répondit, hésitant.

- Toutes les portes sont rouges, cependant elles ne se comportent pas toutes de la même manière. Il y a de bonnes portes, celle que vous passez et qui vous permettent de progresser vers la sortie. Il y a de mauvaises portes, qui vous arrêtent dans votre progression car elles ne s’ouvrent que sur des culs-de-sac. Mais ce n’est pas tout, il y a des portes qui peuvent être aussi bien bonnes que mauvaises et c’est, semble-t-il, le hasard qui en définit le type en ouvrant soit sur la suite du parcours soit sur un cul-de-sac. Et puis, il y a toute une famille de portes, ni bonnes ni mauvaises, qui ne mènent nulle part : soit elles vous ramènent à l’endroit que vous venez de quitter, soit elles vous transportent à l’autre bout du labyrinthe, soit pour les plus étranges d’entre elles, elles n’aboutissent vraiment nulle part, elles ouvrent sur le vide. Et c’est là que cela devient dangereux car, si vous n’y prenez pas garde, il semble que vous puissiez vous y perdre. Et toutes ces propriétés semblent se combiner pour donner une multitude de comportements toujours plus bizarres.

     Mon cher Ignacio, mon cœur se réjouit et mon âme est sereine. Tu viens de partager mon expérience et tu m’as rejoint. Je suis soulagé car j’ai trouvé un disciple digne d’acquérir mon savoir, quelqu’un qui ne passe pas à côté des choses mais dont le comportement pousse à la révélation des connaissances de ce monde.

     Alors, doucement, Merlin se retourna pour enfin faire face à Ignacio et celui-ci découvrit un double de lui-même. En souriant, Merlin tendit un bras et au moment où sa main effleura l’épaule d’Ignacio, son image s’effaça comme une vapeur qui se disperse.

     Ignacio appela Merlin, mais personne ne répondit. Alors il prit le chemin du retour en direction de la maison de Merlin où Fidelius l’accueillit : « bonjour maître Ignacio, je vous attendais, je suis heureux que vous soyez revenu ».


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